So

Un concert plein de nostalgie hier soir pour moi, avec le retour pour une date parisienne de Peter Gabriel..

En 1986, Peter Gabriel lançait le disque qui allait assoir définitivement sa popularité : So. Après une première carrière tonitruante au sein du groupe qu’il avait fondé avec quelques amis, Genesis, Peter Gabriel s’était lancé, en pleine gloire, dans une carrière solo bien plus risquée, et à l’horizon commercial plus sombre, bien que passionnante de bout en bout : une vraie personnalité se cachait derrière les costumes et masques des concerts de rock’prog’ du Genesis du début des années 70.

Mais So était un vrai virage. Déjà, c’était son premier disque doté d’un nom. Ca c’est grand public ! Et c’est aussi le disque du grand tube de Peter Gabriel, le truc que la terre entière a entendu, voire a dansé dessus : Sledgehammer.

Avant So, Peter Gabriel avait sorti un disque passionnant… mais assez hermétique. Expérimentant avec les nouvelles techniques du sampling, avec des paroles souvent mystiques… Magnifique, mais clairement pour un public de plus en plus restreint. So prend le contrepied de tout cela, avec des chansons plus accessibles, un son plus clair, et même, effectivement, des tubes.

Et puis, So, c’est avant tout pour moi… le premier disque que j’ai acheté ! Avec mes sous, un joli 33 tours que j’ai usé jusqu’à l’os. Autant dire que d’assister à une tournée sur le thème de cet album est forcément une grosse machine à remonter dans le temps.

La tournée originale de « So » a même failli être pour moi mon premier souvenir de concert, puisqu’ils étaient passés dans ma ville, maison des sports, le 1er juin 1987 (j’était tellement frustré d’être trop jeune pour y aller que je me souviens encore précisément de la date !).

Depuis ce premier disque, jamais la musique de Peter Gabriel ne m’a quitté. J’ai bien sûr évolué, et mes goûts avec, j’ai découvert bien d’autres terrains que ce pop-rock britannique teinté de world. Mais je suis toujours revenu régulièrement à cette musique pleine de coeur et faussement simple.

Et même si So n’est pas mon disque préféré, j’ai donc assisté avec grand plaisir à cette soirée pleine de nostalgie, avec les mêmes musiciens que pour la tournée de 1987.

Bercy, toujours aussi grand, bien trop grand pour une quelconque intimité. La salle est pleine à craquer. 20h pile, les lumières s’éteignent, et un vieux monsieur chauve à barbiche blanche monte sur scène. Comme il l’a toujours fait, Peter Gabriel vient lui-même présenter la première partie, en encourageant les applaudissements. Elégant. Tout habillé de noir, il revient rapidement en coulisses, laissant la place à deux jeunes filles suédoises, l’une au piano, l’autre au violoncelle. Première partie tout en douceur, et… d’une rapidité presque frustrante ! En 20mn, retour à la lumière.

Le « vrai » concert commence par une surprise : Lévon Minassian, musicien français (il est de Marseille !), et fidèle compagnon de Peter Gabriel, joue l’introduction du disque « Passion » avec son doudouk, une petite flûte traditionnelle arménienne. Atmosphère magique.

Après cette petite introduction, nouvelle surprise : la salle se rallume. Et pourtant, PG revient sur scène. Il explique dans un français plutôt approximatif que le concert se dégustera comme un bon repas, en trois parties :

  • en entrée, un set accoustique, avec les lumières allumées, comme si on était les spectateurs discrets d’une répétition entre amis
  • en plat de résistance, l’arrivée de l’électricité et de l’électronique, pour quelques morceaux de son répertoire
  • et en dessert, l’intégralité de So
Pour finir de rendre atypique cette introduction de ce concert, le premier morceau est doux, complètement inconnu, et… inachevé. « Parce que souvent, le voyage est plus intéressant que la destination ». Soit. Certaines parties n’ont pas de paroles, juste PG et le fidèle Tony Levin à la contrebasse.
Après quelques morceaux purement accoustiques, on bascule, en plein milieu d’un de mes morceaux préférés, Family Snapshot, dans des interprétations bien plus énervées et avec un light show convaincant.

Peter Gabriel a 63 ans. Forcément, ça se sent un peu. Il court moins d’un bout à l’autre de la scène, il s’essoufle, certaines parties aigües du chant sont aujourd’hui assurées par les choristes… Mais le charisme est toujours là. Derrière, même si les musiciens ont eu aussi pris de l’âge, ça joue fort. Avec une grosse mention à la section rythmique Manu Katché/Tony Levin, proprement hallucinante. Ces gars là font tout ce qu’ils veulent, avec une facilité et un sens du rythme déconcertant. Et Manu Katché est tellement mieux là à sa place que dans une émission de TV réalité à la noix..

Après cette deuxième partie un peu « best-of », mais aussi avec quelques jolies surprises telles que ce « Family and the fishing net » peu joué en live, on en vient donc à So.

Pas facile de jouer tout un album sur scène, avec les chansons dans l’ordre. L’alchimie qui s’opère chez soi, en écoutant tranquillement un disque, est assez différente du ressenti sur scène. Je ne peux m’empêcher de faire un rapide descriptif morceau par morceau :

  • Red rain est une introduction puissante, on se laisse emporter par ces vagues rouges.
  • Sledgehammer… que dire qui n’ait pas été déjà dit sur ce morceau. Un classique, au sens propre du terme, un vrai morceau populaire mais dont on ne se lasse pas
  • Don’t Give up est un duo tellement lié à son interprète originale, Kate Bush, que toute réinterprétation amène de la déception. Cette fois-ci n’a pas été très différente, avec une des choristes qui n’a pas démérité… sans parvenir à la qualité de la version d’origine
  • That voice again est peu connu en live, et pour cause : le morceau ne passe pas très bien sur scène, pour une raison qui m’échappe. Ca reste un beau souvenir du disque d’origine
  • Mercy Street est sans doute la plus belle et plus poétique utilisation d’un instrument aussi basique que le triangle. Une atmosphère douce et étrange pour ce morceau qui me happe à chaque fois
  • Big Time… Encore un morceau qui a du mal à passer le cap de la scène, bien qu’étant très rythmé. Bizarre.
  • We do what we’re told : magnifique mise en scène de ce morceau évoquant l’expérience de Milgram. Perturbant.
  • This is the picture : tout comme « Don’t give up », ce morceau souffre de l’absence du duo d’origine, avec la très déjantée Laurie Anderson.
  • In your eyes : seule entorse à l’ordre d’origine des morceaux sur l’album. Mais comment ne pas terminer sur ce morceau généreux, avec en plus une guest star : pas Youssou N’Dour, pourtant à Bercy 3 jours plus tôt, mais Daby Traore, pour un final festif et rythmé.
C’est déjà les rappels, avec un joli effet de scène sur « The tower that ate people ». Et puis… Biko, comme pour tous les spectacles de Peter Gabriel. Pour ne pas oublier ce qu’était l’Afrique du sud en 1977, et pour ne pas oublier Steven Biko, dont la mort injuste a au moins permis de faire basculer certaines lignes d’horizon.

En résumé, pas de grande révolution ou d’idées extravagante, mais un doux sentiment de « retrouvailles ». Sous chaque photo de concert de la page Facebook du chanteur, un encourageant « see you next year ! ». A très bientôt donc Peter 🙂

 

 

One Comment

  1. Répondre
    martibon 29 décembre 2013

    bonjour,

    Après avoir vu, vu et revu Secret World, le DVD de la tournée de SO. Puis Growing up, le DVD suivant.
    Et ayant eu la chance de le voir à Bercy à la même époque.
    Quel ne fut pas ma déception ces dernières années de constater que le temps, avait laissé des marques visibles. Le New blood life, est d’une tristesse infinie, atone, sans la moindre énergie deployée.
    Quel contraste……

    Etant fan quasi-inconditionnel de ce très artiste depuis l’époque bénie de Génésis, je préfère rester sur ces souvenirs qui font dresser les poils des bras.

    Bien à vous

    cordialement

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *