Dilemme

Demain, il faut aller voter. J’ai toujours voté dans ma vie, jusqu’à la plus petite des cantonales, ce n’est pas pour reculer pour la prochaine Présidentielle. Mais pour la première fois de ma vie, à 24h de l’échéance, je n’ai aucune idée du bulletin qui ira dans l’urne pour moi…

Bon, histoire de ne plus en être à un paradoxe près, je me met à parler de ça en pleine « trève pré-électorale », là où personne n’est censé en parler. Mais bon, cette règle s’avère de plus en plus en décalage avec la société d’aujourd’hui, si j’en crois mes listes d’amis qui ne se privent pas pour continuer à militer pour leur candidat favori. Et je ne parle pas des résultats « sortie des urnes » qui ne manqueront pas d’être largement diffusés avant 20h demain soir..

Pour en revenir à mon dilemme, j’ai devant moi les « professions de foi » des différents candidats. J’ai suivi la plupart des débats, je me suis intéressé, j’ai écouté. Et je ne suis pas plus avancé !

Marine Le Pen : hors de question, bien entendu. Ma seule interrogation, c’est de savoir si les sondages savent pondérer à sa juste valeur sa candidature (j’en avais déjà parlé ici)

Nicolas Dupont-Aignan : le programme de Le Pen, la xénophobie en moins. Un positionnement original, radicalement anti-européen. Je m’étonne qu’il ne perce pas plus, comme avait pu le faire De Villiers à l’époque. Peut être un manque de charisme, ou d’accroche originale ? En tout cas, ça sera sans moi, merci.

Nicolas Sarkozy : je pense que la droite n’a pas fini de se mordre les doigts d’avoir sous-estimé l’impopularité du bonhomme. On peut pas contester l’union derrière l’homme (ce n’est pas si fréquent à droite !), mais il me semble que notre cher Président est un peu trop resté dans sa tour d’ivoire et a jaugé ses chances un peu légèrement. Et puis forcément, il a le handicap du bilan à assumer, ce qui en politique n’est jamais une bonne chose, surtout en France.

François Bayrou : on est loin du buzz « sexy centriste » de 2007 ! Qu’en dire… il a loupé sa campagne. Programme réaliste mais austère, ça pourrait être un vrai « choix de raison ». Il me semble qu’en 2007 il avait largement bénéficié du rejet que subissait Ségolène Royal de la part de toute un « centre-gauche » qui est plus facilement amadoué cette année par Hollande. Et surtout, la grande question : avec qui gouvernerait-il ?

Jacques Cheminade : l’hurluberlu de service. Dès qu’il apparaît à l’écran, c’est comme un code avec les spectateurs : « tiens, on va pouvoir se foutre de sa gueule ». Les relents sectaires ne sentent pas bien bon, l’affiliation avec un illuminé américain non plus, mais je dois avouer que, si on essaie d’écouter le bonhomme sans aprioris, il ne dit pas que des bétises. Même le programme de relance économique par la conquête de l’espace ne me fait personnellement pas rire : après tout, Kennedy n’avait pas fait autre chose avec son « we will go to the moon » !

François Hollande : Bon, faut bien avouer que rarement élection présidentielle n’a porté aussi peu de suspense. Clairement, c’est son tour. Plus inquiétant est le manque de ferveur autour du candidat : même parmi mes amis socialistes, je connais très peu de gens qui voteront pour lui en étant parfaitement convaincu par le personnage. Je ne reviendrai pas sur son côté fade, peu rigoureux, etc… Après tout, cela peut amener un côté plus réaliste et terre à terre qui changera du nawak qu’on a connu. En revanche, je m’interroge vraiment sur le « ticket » qu’il a à nous proposer… ou plutôt qu’il ne nous propose pas : qui sera le premier ministre ? Plus que jamais, cette nomination sera déterminante pour la suite… et c’est l’inconnue totale. Dommage, personnellement ça m’aiderait beaucoup dans mon choix.

Jean-Luc Mélenchon : ce n’est pas un scoop de dire que c’est la surprise de ce scrutin, et le seul vrai suspense : sera t’il devant ou derrière Marine Le Pen ? S’il est devant, il pourra peser fortement sur les législatives, et sur la pression « gauchisante » auprès du gouvernement. Si Le Pen est troisième, elle pourra participer à l’implosion de la droite et sa reconstruction (pour le pire….). Quant à Mélenchon… j’admire l’orateur, moins les idées portées qui me semblent à la fois assez démagogues et peu réalistes… mais qui répondent effectivement à une vraie angoisse de la société d’aujourd’hui. J’ai vraiment du mal à jauger son rôle dans les années à venir, en fait.

Eva Joly : j’ai failli l’oublier dans ma liste, c’est dire… La personne est sans doute très respectable et intègre, mais ne colle vraiment pas avec le message écologique, qu’elle aura d’ailleurs très peu porté. Une fin de campagne axée essentiellement sur les scandales Sarkozy (que personne d’autre n’a osé porté… je me demande encore pourquoi d’ailleurs). Voilà en tout cas comment un parti qui porte des idées les plus proches des miennes aura réussi à se faire oublier complètement auprès d’électeurs pourtant à priori sympathisant comme moi.

Philippe Poutou : pffff… Certainement le seul des candidats avec qui j’irais avec plaisir boire une bière. Pour le reste.. tout ça reste très flou et symbolique. Ils ont loupé une vraie union de la gauche « dure », dommage.

Nathalie Arthaud : la même chose que Poutou, en moins sympathique. J’ai du mal à voir à quoi servent ces candidatures, à part à radicaler le combat « les ouvriers contre les autres ». Un peu comme Le Pen, ces candidats apportent de mauvaises réponses à de vraies bonnes questions. Mais là, sans le folklore et le capital sympathie d’Arlette, tout ça n’ira vraisemblablement pas bien loin…

Voilà… Je ne suis pas vraiment avancé avec tout ça. Aucun « coup de coeur », aucun espoir vraiment soulevé par une campagne qui n’a cessé de se rouler dans les débats de bas-étage. Je ne veux pas voter au hasard, donc je vais continuer à cogiter… Dur !

Je terminerai avec une vraie frustration : j’aimerais vraiment, pour que tout ceci gagne en visibilité, qu’on casse la tradition française et que les candidats nous proposent des « tickets » à l’américaine : un candidat qui annonce haut et fort son choix de premier ministre gagnerait, je trouve, vraiment en visibilité. Mais, ne serait ce que pour garder des cartouches sur les négociations d’entre deux tours, ce n’est pas près d’arriver…

Enfin bon… Malgré tout ce mic-mac, il est clair et certain que j’irai voter. Je ne veux pas glisser dans un « tous des pourris », et surtout, comme le disait un slogan que j’avais lu il y a quelques temps : « En Mai prochain, l’agence de notation… c’est VOUS ! »

 

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