Fichu mur

Ya des fois où Facebook est quand même sacrément violent dans sa façon de mettre en avant certaines informations…

Facebook me l’a rappelé ce matin, le 4 juin, c’est l’anniversaire de Virginie. Nini. Virginie, c’est une jeune fille que j’ai rencontré pendant ma « période de folie », celle où j’écumais les sites de rencontres. Au milieu de ces rencontres souvent assez dépitantes, Nini était sortie du lot, par son histoire, son humour, ses taquineries. Pas vraiment d’affinités ou de vision commune, mais des conversations souvent marrantes, qui restaient à distance, puisqu’elle avait la drôle d’idée d’habiter à l’autre bout de la France. Quelque part, cela donnait un côté assez décalé à nos échanges, vu qu’il était assez improbable qu’on se rencontre un jour.

Et puis un soir, sur un coup de tête, elle me sort « et si je débarquais chez toi ? ». Banco. On va sur le site de la SNCF, elle prend un billet pour un périple de 10h (!) de train quelques jours plus tard, et… voilà.

Sur le trajet, elle m’envoie plusieurs SMS inquiets « tu déconnes pas, tu me plantes pas hein, je vais pas faire tout ce trajet pour rien ! ». J’étais bien là, à l’heure dite, sur le quai de la gare. On s’est trouvé du regard, sans trop savoir comment réagir ni quoi faire. On a fini par se tomber dans les bras l’un de l’autre, et à s’embrasser fougueusement sans même avoir entendu le son de nos voix.

Ce n’était pas de l’amour. Pas de coup de foudre ou de coup de coeur, ni…. rien de très descriptible. On savait que ça serait un week-end exceptionnel, car difficile à refaire, et pourtant on ne voyait pas ça comme une aventure non plus. C’était… juste un moment hors du temps qu’on s’était accordé.

Nini est restée le week-end chez moi. On riait beaucoup, on baladait ma boule de poils du moment, on bavardait de tout, de rien. On parlait de nos conquêtes respectives comme deux potes se racontant leurs exploits. On fît l’amour, presque par accident, à l’image de cette rencontre. Pas de l’amour, pas du cul, juste une petite bulle hors de la réalité, sans besoin de mettre un mot dessus. Peu importait finalement, on avait réussi notre coup de faire la nique à la réalité et à voler ce WE, comme des garnements.

Quand notre premier regard se transforma en dernière étreinte, toujours sur le même quai de gare, on savait tous les deux qu’on ne se reverrait pas. Pas de rupture puisqu’on n’a jamais mis de mot sur « ça ». De la même manière qu’on n’avait jamais parlé de comment se passerait ce weekend, on n’avait jamais évoqué comment il se terminerait. Juste une bulle qui s’effaçait.

Nini est restée un joli souvenir. On continuait à bavarder. Elle me racontait ses amours, son chéri qu’elle avait enfin trouvé, sa grossesse, m’envoyait des photos de ses enfants…

Nini est morte il y a maintenant 3 ans, à l’âge de 29 ans, laissant derrière elle deux adorables mômes. Je n’ai jamais su comment. Juste un mur Facebook qui s’est transformé d’un coup en cahier des souvenirs, m’apprenant ainsi la nouvelle. Des hommages, des petits mots. Je n’ai jamais osé demandé à ses proches des explications, qui n’auraient pas changé grand chose au drame de cette disparition si injuste.

Et chaque année, Facebook me rappelle le jour de l’anniversaire de Nini, jour où je pose un mot dérisoire sur ce fichu mur, comme on déposerait une fleur anonyme sur une pierre tombale. Et je garde le souvenir de ce regard espiègle sur un quai de gare, gourmand par avance du joli pied de nez qu’elle allait faire, le temps d’un week-end, à la vie.

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